Médias
et justice ne font pas bon ménage.
Ce constat n’est évidemment pas
nouveau. Depuis plusieurs années, et de façon quasiment récurrente, la justice se plaint de l’attitude des médias, notamment dans le cadre d’affaires judiciaires. A la recherche du
scoop et de sensationnalisme, une partie de la presse semble parfois prête à tout pour diffuser
une « information » (cette qualification
étant parfois toute relative).
Et lorsqu’un potentiel scandale concerne un homme
politique ou une personnalité publique, l’appétit des médias semble encore plus important,
pouvant aboutir à un réel lynchage médiatique condamnant sans nuance un
individu. Pourtant, il devrait exister un garde-fou important : la présomption d’innocence.
Édouard Cruysmans, assistant à l’Université catholique de Louvain, assistant à l’Université Saint-Louis Bruxelles, doctorant et spécialiste de ces questions, éclaire les enjeux de ce débat.
Récemment, la presse s’est emparée de ce que l’on qualifie désormais de l’« affaire Luperto », du nom de l’ancien Président du Parlement
de la Communauté française. Il n’a suffi que de quelques plaintes déposées à son encontre pour lancer la machine médiatique, aboutissant à condamner hors des prétoires cet homme politique. Et
pourtant, celui-ci demeure présumé innocent…
Le principe de la présomption d’innocence est un des fondements du procès pénal. Inscrit à l’article 6, alinéa 2, de la Convention européenne des droits de l’homme, il implique que toute personne
soit présumée innocente, et traitée comme telle dans le cadre d’un procès équitable, jusqu’à ce que sa culpabilité soit légalement établie.
Le respect de la présomption d’innocence s’applique évidemment au juge,
lorsqu’il officie.
En revanche, aucune
disposition légale ne contraint, en Belgique, le
journaliste au respect de ce principe. Les médias ne peuvent
cependant ignorer totalement la présomption d’innocence. Dans un arrêt du 29 août 1997 (Worm c. Autriche), la Cour
européenne des droits de l’homme a affirmé que « les personnalités connues sont en droit de bénéficier d’un procès pénal équitable tel que
garanti à l’article 6, ce qui, en
matière pénale, comprend le
droit à un tribunal impartial. Les
journalistes doivent s’en souvenir qui rédigent des articles sur des procédures pénales en cours, car
les limites du commentaire admissible peuvent ne pas englober des déclarations qui risqueraient,
intentionnellement ou non, de réduire les chances d’une personne de bénéficier d’un procès équitable ou de saper la confiance du
public dans le rôle tenu par les tribunaux dans l’administration de la justice pénale ».
Outre cet
enseignement de la Cour, le journaliste doit avoir égard à plusieurs règles déontologiques qui,
sans exiger expressément le respect du
principe de la présomption d’innocence, le souhaitent indirectement.
En effet, dans le
Code de déontologie journalistique du 16 octobre
2013, adopté par le Conseil de déontologie journalistique, plusieurs
dispositions précisent notamment que les journalistes « respectent la vérité
», « ne déforment aucune
information
», qu’ils «
tiennent compte des droits de toute personne mentionnée explicitement ou implicitement » et que « l’urgence ne dispense
pas les journalistes de […] mener une enquête sérieuse ». Le texte souligne encore que, «
lorsque des journalistes diffusent des accusations graves susceptibles
de porter atteinte à la réputation ou à l’honneur d’une personne, ils donnent à celle-ci l’occasion de faire valoir son point de
vue avant diffusion de ces accusations ». En d’autres termes, la présomption d’innocence ne peut être négligée par le journaliste, celui-ci devant l’intégrer dans une analyse
davantage rigoureuse et prudente de l’information.
Le non-respect de ces
règles déontologiques ne peut,
à lui seul, aboutir à une condamnation civile du
journaliste. Toutefois, gardons à l’esprit que le journaliste doit adopter
un comportement suffisamment prudent et diligent pour éviter la commission d’une faute au sens de l’article 1382 du Code civil, c’est-à-dire engageant sa
responsabilité civile. Dès lors qu’un juge analyse le
comportement adopté par un journaliste
en comparaison avec le comportement qu’aurait adopté le journaliste suffisamment prudent et
diligent dans les mêmes circonstances, le
respect des dispositions déontologiques est
alors pris en compte.
Constatant cette
absence d’obligation légale et souhaitant éviter le détour par les règles déontologiques,
certains juges ont considéré que le principe de présomption d’innocence ressortit de la protection du
droit à l’honneur et à la réputation ou plus
largement du droit à la vie privée. Dès lors, une atteinte à la présomption d’innocence peut constituer une atteinte à l’honneur ou la réputation d’une personne, ce qui peut aussi aboutir
à une condamnation civile du journaliste
sur la base de l’article 1382 du Code civil.
Enfin, certains
auteurs plaident pour une consécration plus large de
la présomption d’innocence : ils souhaiteraient que ce principe soit
reconnu comme un droit opposable à tous, permettant
alors de limiter la liberté de la presse. Il n’est évidemment pas
question de museler la presse, mais simplement de garantir à tout individu le respect de sa présomption d’innocence, évitant alors certaines dérives dévastatrices de la
presse.
L'association Des jeunes pour les droits de l'Homme utilise des outils (livrets, DVD, etc)
reprenant les 30 articles de la Déclaration universelle des droits de l’Homme des Nations Unies afin que ces droits
deviennent une réalité.
Le philanthrope Ron Hubbard a écrit ces mots : « Le jour où
nous pourrons tous avoir confiance les uns dans les autres, la paix régnera sur
terre. »
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